livre demi-format US de 160 pages à couverture souple.
How To Play, 6 pages, résume rapidement le concept du jeu et poursuit sur ce qu'est le jeu de rôles.
A Land of Balm and Virtue, 10 pages, décrit le décor du jeu. Il s'agit d'un Far-West imaginé sur l'époque où Deseret n'était pas encore devenu l'Utah. Il s'agit de donner au meneur les bases pour pouvoir improviser : les montagnes font telle taille, on trouve facilement ces métiers dans un village standard, les gens portent ce type d'habits, les non-croyants sont traités ainsi, etc.
Creating Characters, 32 pages, aborde en profondeur toute la création de personnage, avec des conseils au meneur pour la superviser. Chaque élément est décrit et développé avec des exemples. Une récapitulation termine le chapitre.
Conflict & Resolution, 32 pages, développe le système de jeu, qui gravite autour d'un conflit, de ce qui est en jeu dans ce conflit, et de l'escalade possible du conflit. En effet, dès qu'un conflit apparaît entre deux personnages ou entre un personnage et un objet, il faut d'abord définir ce qui est en jeu. Ensuite seulement le conflit est joué jusqu'à résolution, ou escalade. L'escalade change la donne d'un conflit. Par exemple, un personnage sort son pistolet. Cela demande de continuer la résolution avec cette nouvelle information. Le chapitre se termine aussi par une récapitulation des règles.
Resolution In Action, 8 pages, est un chapitre de conseils au meneur sur les conflits et leur résolution.
The Structure Of The Game représente 4 pages de conseils aux joueurs et au meneur pour jouer, pour les parties à court terme ou celles à long terme.
Creating Towns, 24 pages, se concentre sur la façon de créer une ville, car le plus souvent un scénario sera un village ou une ville, qui connaît des problèmes de foi. Ces problèmes vont empirer jusqu'au meurtre, et les personnages sont là pour arrêter cela. En prenant exemple sur l'espèce de hiérarchie des péchés du jeu, le chapitre donne des exemples sur ce qui peut aller mal et les conséquences du problème.
Between Towns consacre 4 pages à l'évolution des personnages et aux règles sur l'expérience.
Creating NPCs, 12 pages, fournit toutes les règles sur la façon de créer des PNJ, particulièrement les possédés et les sorciers. Une liste de noms et une récapitulation des règles se trouvent à la fin du chapitre.
How To GM, 10 pages, est le chapitre qui donne toutes les ficelles du jeu au meneur. La façon de mener Dogs In The Vineyard, du fait de ses règles particulières, réclame certaines habitudes, toutes détaillées ici.
Design Notes, 6 pages, aborde les choix faits par l'auteur ainsi que des conseils sur la façon d'adapter la foi du jeu à un autre temps, une autre époque.
Le jeu se termine sur un index et une feuille de personnage.
La version italienne, en plus d'une mise en page et d'illustrations différentes, comporte plusieurs ajouts :
- une préface détaillant l'édition italienne (2 pages)
- des notes et conseils de jeu - ajouts clairement identifiés - disséminés dans le livre
Cette fiche a été rédigée entre le 8 mai 2000 et le 8 mai 2009.
Dogs in the Vineyard (DITV) s'est gagné la réputation d'être devenu un jeu culte dans le milieu de la scène "indie" anglophone.
Sa beauté consiste à présenter un contexte extrêmement stylisé dans lequel les joueurs ont l'autorité absolue d'interpréter à leur guise la loi divine. De village en village, ils confrontent le péché qui consiste toujours en un contexte ambigu nourri de sentiments mauvais, sans solution, sans noir et blanc. L'ambigüité morale est le focus de ce jeu, qui force donc les joueurs à prendre position. LE MAÎTRE DE JEU N'INTERVIENT JAMAIS, IL SE CONTENTE DE RÉAGIR.
Des films et pièces comme Carrie (King), Phèdre (Racine) ou plus récemment Un Homme et son Péché (Grignon) traduisent cet état d'esprit, cette prise de position sur le vrai et sur le sens de la vie, les conséquences de pousser ses choix trop loin.
DITV met l'accent sur les impacts familiaux, sociaux et moraux d'une balle tirée : vaincre le fermier violent alcoolique n'est qu'accessoire, le vrai défi sera de confronter ensuite ceux qui souffriront des conséquences - épouse prise avec trois enfants mourant de fin, communauté déchirée, vieilles haines.
DITV est un jeu philosophique par excellence ; l'expérience de jeu m'a été extraordinaire chaque fois, mais épuisante personnellement.
Le système de jeu, de façon stupéfiante, renforce ce sentiment. Chaque action a une conséquence, chaque décision de continuer ou de céder aggrave potentiellement en retour la situation... Parler, dans DITV, est une arme aussi redoutable que le pistolet. Les blessures sont aussi bien sentimentales que personnelles, et négociées par le groupe : l'histoire prime sur la plausibilité, les règles y veillent.
Dogs in the Vineyard est de très loin le jeu qui m'a le plus impressionné et enthousiasmé, rafraîchi même, depuis au moins 10 ans. C'est un choc de culture violent pour le rôliste ; on peut le haïr car il bouscule les réflexes usuels, ou l'admirer pour ce ce qu'il amène, mais une chose est sûre, il ne peut laisser indifférent lorsque joué par un Maître de jeu qui a compris le système et sa portée.
Enfin, je souligne que DITV se démarque comme le premier sinon le seul JDR à ce jour à mettre en jeu des notions comme la FOI de façon intelligente, en les basant sur l'incertitude, le choix et la conviction. Rien n'est sûr dans DITV, mais chaque choix a des conséquences.
Comme tout paradis a son serpent, DITV a aussi ses défauts :
- beaucoup de dés à tirer, ce qui aurait pu aisément être diminué de moitié voire plus
- le mécanisme de "réplique" aux attaques, bien qu'il serve les fins narratives voulues, aurait pu être simplifié
- à petit tirage, son prix est forcément élevé, d'autant plus qu'il s'ajoute à des frais de port individuel
- le graphisme est minimal et très austère, seule la couverture étant illustrée professionnellement
- utilisation d'un langage très personnel et direct, qui peuvent déplaire comme style
- l'univers comme tel vise un créneau de goûts assez précis, facile à comprendre, mais qui s'adapte mal à des variantes car elles en dénaturent l'essence, malgré les différentes tentatives en ce sens de différents fans
- peu d'exemples rendent nécessaire de suivre le "making of" sur sa communauté de naissance, the Forge (www.indie-rpgs.com) pour en saisir l'esprit vu la perspective radicale qu'il amène
- absence de suivi publié, malgré un nombre étendu de villages disponibles sur le web
Bref, un véritable chef-d'oeuvre, qui mérite certainement à mes yeux un Grog d'Or non pour sa popularité, mais le génie de son design. À inclure, définitivement, parmi les monuments du JDR moderne. Il a changé radicalement ma vision du jeu de rôles, à l'instar de l'excellent Burning Empires de Luke Crane (2006), mais plus profondément et plus personnellement encore.
Dogs in the Vineyard est vraiment un jeu original. Ce qu’il nous propose de jouer est du jamais vu, et surtout c’est très, très bien fait. Jouer les gardiens d’une foi dont les joueurs ne savent presque rien, c’est une gageure. Et pourtant une grande partie de la réussite de ce jeu tient à ça : nulle ne juge les personnages joueurs, car ce sont eux les juges. Ils connaissent la vérité et ils l’assènent, à coup de livre sacré de préférence mais aussi à coups de fusil si nécessaire. Ils ont toujours raison, mais à eux de voir jusqu’où ils sont prêts à aller pour le montrer. Là on arrive à l’autre partie fort réussie du jeu, complémentaire : l’escalade dans les conflits. Lorsque l’on s’oppose à quelqu’un, chacun lance une brouette de dés et pioche dedans pour présenter ses arguments. Quand on est à court d’argument, il faut accepter sa défaite ou lancer plus de dés. Pour lancer plus de dés, il faut… parler plus fort, autrement dit escalader vers des moyens de plus en plus violents de se faire entendre : on en vient vite aux mains puis aux armes. À chaque fois, la question se pose donc aux personnages joueurs ou non joueurs : à quel point ce conflit est-il important pour moi, et jusqu’où suis-je prêt à aller pour l’emporter ? Une discussion théologique doit-elle se finir dans le sang ?
Aussi étranger que l’on soit à la religion en général, le jeu est fascinant par sa logique, par le fait avéré (dans le jeu) que si on tolère la moindre faute, la moindre injustice, la situation va obligatoirement dégénérer pour finir par perdre toute la communauté. Et les personnages joueurs sont les seuls à le voir. À eux de convaincre la communauté, de chasser le mal, de leur faire comprendre qu’ils agissent pour le bien de tous en condamnant, parfois avec fermeté. Le jeu met régulièrement les personnages joueurs dans des situations incroyables où la théologie, le bien et le mal s’entrecroisent, où chacun juge avec plus ou moins de fermeté alors que, encore une fois, la religion n’est jamais définie dans le livre de base, si ce n’est à travers trois ou quatre grands traits qui ne sont que des suggestions.
Les personnages joueurs sont des prêtres itinérants, à chaque séance ils vont à la rencontre d’une nouvelle communauté isolée, qu’ils ont peut-être déjà visitée des mois auparavant. Dans chaque communauté il y a un truc qui ne tourne pas rond. Parfois c’est juste un embryon de problème qu’il faut étouffer dans l’œuf, et parfois les choses ont à ce point dégénéré que ça tourne à l’exorcisme et à la chasse aux sorcières. Le meneur, pour préparer la partie, doit créer un village et définir son problème, en indiquant jusqu’où il a déjà dégénéré. Le livre fournit tous les conseils pour que la tâche soit simple et amusante, et plusieurs villages sont fournis à titre d’exemples jouables, à divers degrés de gravité. Le jeu donne au meneur un conseil récurrent dans les jeux qui laissent une grande part créative au joueur : ne pas avoir de solution préconçue en tête. Le meneur définit le problème du village, mais pas la façon dont il devra être résolu. Les solutions viennent des joueurs, sans jugement ni validation de la part du meneur.
Si j’adore ce que produisent les règles dans le jeu, je n’apprécie guère leur forme pour autant. J’ai l’impression qu’il était possible de faire aussi bien mais plus simplement. On lance beaucoup de dés, on passe du temps à les analyser, on utilise le vocabulaire du poker (pour l’escalade)… C’est assez mal passé dans le groupe avec lequel j’ai testé, cette gestion des dés nous sortait trop fréquemment de la fiction. Je ne suis pas adepte des brouettes de dés, ni des dés exotiques ; je trouve que l’on gagne en accessibilité à n’utiliser que des dés à six faces. Et ici on en a besoin en assez grandes quantités, pas moyen de s’en sortir avec un ou deux de chaque.
C’est le seul reproche que j’ai à faire au jeu, et je suis conscient que ce ne sera pas un problème pour d’autres tables de jeu. Le livre est agréablement écrit, ce qui est une agréable surprise quand on sait qu’il est du même auteur qu’Apocalypse World. On retrouve facilement l’information dont on a besoin, le découpage est clair, le livre est succint.
C’est un très, très bon jeu, qui promet des séances mémorables. Ne vous embêtez pas avec la question de savoir si c’est narrativiste, rigoliste ou nombriliste, ne froncez pas trop les sourcils à l’énoncé du thème certes peu aguichant du jeu : foncez les yeux fermés, jouez et appréciez, c'est un jeu unique et renversant.
Critique écrite en novembre 2015.
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